Vous doutez de vos capacités ? Et si le vrai frein, c’était ce que vous croyez de vous ?

Vous envisagez de changer de métier, mais une pensée revient en boucle : « Je vais décrocher au bout de deux semaines « , « Je n’y arriverai pas ». Vous ne remettez pas en cause votre envie, mais vous doutez de pouvoir aller au bout. Vous anticipez l’échec avant même de commencer.

Ce frein ne parle pas de vos compétences réelles. Il parle de la façon dont vous percevez vos capacités à les utiliser dans un nouvel environnement. Et ce frein a un nom : le sentiment d’auto-efficacité.

Le sentiment d’auto-efficacité : croire qu’on peut y arriver change tout

Le psychologue Albert Bandura a montré que ce n’est pas seulement ce qu’on sait faire qui compte, mais ce qu’on croit pouvoir réussir avec ce qu’on sait. Ce sentiment d’auto-efficacité influence directement la façon dont on aborde un projet de reconversion professionnelle : si vous croyez que vous allez échouer, vous hésitez, vous différez, ou vous abandonnez trop tôt.

Ce que Bandura met en lumière, c’est qu’entre deux personnes ayant les mêmes compétences, celle qui croit en sa capacité à les utiliser progressera davantage. Non pas parce qu’elle sait plus, mais parce qu’elle ose plus longtemps.

Et ce sentiment n’est pas inné. Il se construit. Ou il s’érode. Par les expériences passées, le regard des autres, les comparaisons constantes, les échecs mal digérés.

Douter de soi, c’est parfois avoir porté trop de crédit au regard des autres

Luc, 39 ans, veut se reconvertir dans la maintenance informatique. Il confie : « Je me suis toujours débrouillé avec les ordis. Mais dès qu’on me parle de formation, j’ai l’impression que mon cerveau va bloquer. J’ai l’impression que ce n’est pas un monde pour moi ».

Anaïs, 46 ans, a commencé une formation d’aide-soignante, mais hésitait : « Je n’ai jamais été bonne à l’école. Le mot « cours », ça m’étouffe. J’avais peur de ne pas suivre ».

Ces peurs ne parlent pas de compétence. Elles parlent de conditionnement. Des phrases entendues trop souvent : « tu n’es pas fait pour ça« , « tu n’es pas très scolaire« , « tu vas te planter« . Et à force, elles prennent la place de votre propre voix.

Ce que Bandura montre, c’est que l’échec vient rarement d’un manque de capacité. Il vient d’un abandon anticipé, provoqué par un déficit de confiance en sa capacité à apprendre, progresser, persévérer.

Ce n’est pas votre image qu’il faut changer, c’est votre regard sur l’effort

Reprendre confiance, ce n’est pas se convaincre qu’on est doué. C’est se réhabituer à l’effort, à l’erreur, à l’inconfort de l’apprentissage. Ce n’est pas votre envie qu’il faut valider. C’est votre capacité à continuer même quand c’est déstabilisant.

Changer de métier, ce n’est pas réussir du premier coup. C’est réapprendre à ne pas se juger trop vite. C’est passer du besoin de réussir à l’envie d’avancer, sans tout maîtriser tout de suite.

Le sentiment d’auto-efficacité se reconstruit. En posant des actes simples. En réussissant par petits pas. En recevant un retour positif. En voyant que l’on tient plus longtemps que prévu.

C’est ce que permet une reconversion bien accompagnée : replacer la progression au centre. Refaire confiance à son processus d’apprentissage. Et ne plus décider à votre place ce que vous êtes capable d’essayer.

Trois moyens de reconstruire votre sentiment d’efficacité

  • Reprenez une tâche simple que vous n’aviez pas faite depuis longtemps. Faites-la jusqu’au bout, sans vous presser.
  • Notez une difficulté que vous avez surmontée l’année dernière. Demandez-vous ce que vous en avez tiré.
  • Lancez une action concrète vers votre projet : un appel, une inscription, une demande d’information. Ne visez pas réussir, visez commencer.

Vous êtes capable de plus que ce que vous croyez. Mais il faut oser le découvrir, pas le vouloir à tout prix le prouver. Votre parcours peut encore s’écrire autrement, dès lors que vous osez commencer avec humilité et persévérance.

Vous n’avez pas le bon niveau de diplôme ? et si ce niveau n’était pas justifié ?

Vous envisagez de **changer de métier**, mais une voix intérieure vous retient : « Je n’ai pas les diplômes », « Je n’ai pas l’expérience qu’il faut », « Je ne saurai jamais convaincre un recruteur ». Ces phrases, répétées en silence, finissent par façonner une image de soi abîmée. Pourtant, ce doute n’est pas le reflet d’un manque réel. Il est le produit d’un système : ce que les sociologues appellent l’inflation des diplômes.

L’inflation des diplômes : une mécanique qui monte les exigences sans raison

Randall Collins, sociologue américain, a mis en évidence un phénomène discret mais structurant dans les sociétés modernes : plus le niveau moyen de diplôme augmente, plus les employeurs en exigent. Même lorsque les compétences demandées n’ont pas changé. Cette surenchère permanente transforme ce qui devait garantir l’accès à l’emploi — le diplôme — en une barrière de plus. Et ce phénomène est particulièrement marqué en France, où la valeur symbolique du diplôme reste plus forte qu’ailleurs, même dans les métiers où l’expérience devrait primer.

Ce que vous ressentez n’est donc pas une faiblesse personnelle. C’est une réaction à une logique dominante qui valorise davantage les parcours formatés que les expériences réelles. Vous n’êtes pas incompétent. Vous êtes jugé à partir d’un critère qui ne dit rien de ce que vous savez déjà faire.

À force de ne jamais voir ses compétences reconnues, on finit par croire qu’elles ne comptent pas

Ce doute n’est pas qu’intellectuel. Il est intime. Il naît quand vous avez appris sur le tas, exercé des responsabilités sans titre, pris des initiatives invisibles. Et qu’on ne vous les a jamais reconnues. À force, l’absence de validation devient une disqualification intériorisée.

Julie, ancienne caissière devenue assistante de vie, dit : « J’ai appris sur le terrain. Mais comme je n’ai pas de diplôme, je me sens obligée de prouver trois fois plus… et parfois, je n’ose même pas postuler ».

Marc, autodidacte en informatique, témoigne aussi : « Je sais faire. Je l’ai déjà fait. Mais chaque fois que je lis “bac+3 exigé”, je referme la page. C’est comme si une voix intérieure me disait : n’y pense même pas ».

Ce que vous savez faire existe. Mais il n’est écrit nulle part. Alors vous vous mettez à croire que cela ne vaut rien. C’est ce que la norme ambiante vous renvoie, pas ce que vous êtes.

Ce n’est pas vous qu’il faut changer, c’est le regard qu’on porte sur vous

La logique dominante voudrait que chacun prouve sa valeur à travers des certifications, des labels, des parcours standardisés. Mais cette logique est à bout de souffle. De plus en plus d’entreprises comprennent que la compétence n’est pas toujours académique. Elle peut être expérientielle, autodidacte, construite dans l’action.

Changer de métier ne suppose pas d’être reconnu par les critères d’hier. Cela suppose de revendiquer ce que vous avez appris autrement. Et de montrer ce que ça vaut. Et de chercher les lieux — humains ou professionnels — capables de le reconnaître.

Ce que les critères habituels ne voient pas, vos gestes spontanés, vos désirs ou votre manière de faire peuvent pourtant révéler. Ce sont ces caractéristiques, souvent silencieuses, qui dessinent le début d’un autre chemin professionnel. C’est précisément ce que valorise un test d’appétences : ce que vous aimez faire, même sans diplôme, peut devenir un levier de reconversion.

Trois façons concrètes de redonner de la valeur à ce que vous savez faire

* Faites la liste de ce que vous savez réellement faire, même si ce n’est écrit nulle part.

* Demandez à quelqu’un qui vous connaît bien de vous dire ce qu’il admire dans votre manière de travailler.

* Identifiez une compétence que vous avez acquise sans diplôme. Donnez-lui un nom. Racontez comment vous l’avez apprise.

Ce que vous savez faire existe. Il n’a juste jamais été valorisé par les bonnes lunettes. Mais ce regard bouge. Et plus vous montrez ce que vous savez faire autrement, plus le cadre s’ouvre à d’autres parcours. Vous n’avez pas moins de valeur. Vous avez juste grandi en dehors du cadre.